1996 I 1h46 I Fantastique, Comédie I Warner Bros.
1996 I 1h46 I Fantastique, Comédie I Warner Bros.
LE SYNOPSIS
Un peu partout sur la Terre, des soucoupes volantes arrivées de la planète Mars survolent les plus grandes villes du monde. Le président des Etats-Unis, ainsi que ses conseillers militaires, scientifiques et médiatiques décident d’entrer en communication avec ces êtres venus d’ailleurs et dont les intentions leur sont encore inconnues. Mais suite à un malentendu, les martiens attaquent et déciment la population à coup de pistolets lasers. Des citoyens ordinaires, tous différents les uns des autres, vont faire face à leur façon à ces troupes de petits envahisseurs verdâtres clairement pas dénués d’humour.
“Ack! Ack! Ack!”
Casting Complet
- Le Président Américain James Dale / Art Land : Jack Nicholson
- Marsha Dale, la femme du président : Glenn Close
- Barbara Land : Annette Bening
- Le Professeur Donald Kessler : Pierce Brosnan
- Le joueur malpoli : Danny DeVito
- L’attaché de presse Jerry Ross : Martin Short
- Nathalie Lake : Sarah Jessica Parker
- Jason Stone : Michael J. Fox
- Le Général Decker : Rod Steiger
- Tom Jones : Lui-même
- Richie Norris : Lukas Haas
- Taffy Dale, la fille du président : Natalie Portman
- Byron Williams : Jim Brown
- La Femme Martienne : Lisa Marie
- Grand Mère Norris : Sylvia Sidney
- Général Casey : Paul Winfield
- Louise Williams : Pam Grier
- Billy Glenn Norris : Jack Black
- Glenn Norris : Joe Don Baker
- Sue Norris : O-Lan Jones
- Sharona : Christina Applegate
- Mitch : Brian Haley
- Docteur Zeigler : Jerzy Skolomowski
- Maurice, le président de la République Française : Barbet Schroeder
Fiche Technique
- Titre original : Mars Attacks !
- Titre français : Mars Attacks !
- Année : 1996
- Date de sortie : 13 décembre 1996 (USA), 26 février 1997 (France)
- Durée : 106 minutes
- Genre : Fantastique, comédie, science-fiction
- Réalisation : Tim Burton
- Scénario : Jonathan Gems
- Basé sur : les cartes à collectionner Mars Attacks ! et Dinosaur Attacks ! commercialisées par Bubbles Inc.
- Musique : Danny Elfman
- Producteurs : Tim Burton, Laurie Parker & Larry J. Franco
- Société de production : Warner Bros
- Société de distribution : Warner Bros
- Directeur de la photographie : Peter Suschitzky
- Direction artistique : John Dexter
- Création des décors : Wynn Thomas
- Décorateur de plateau : Nancy Haigh
- Effets spéciaux : Michael Lantieri & David Andrews
- Costumes : Colleen Atwood
- Montage : Chris Lebenzon
- Casting : Matthew Barry, Jeanne McCarthy et Victoria Thomas
- Producteurs associés : Paul Deason, Mark S. Miller et Mary Ann Marino
- Lieux de tournage : USA : Burns, Kansas – Dolan Springs, Arizona – Kingman, Arizona – Las Vegas, Nevada – Lawrence, Kansas – Washington DC – Wichita, Kansas; Argentine : Buenos Aires, Federal District
- Pays d’origine : États-Unis
- Langue : Anglais
- Format : Couleur (Technicolor) – DTS / Dolby Digital / SDDS – 35 mm
- Public : PG-13
- Budget : 70 000 000 $
- Recettes : USA – 37 771 017 $ / France – 2 148 502 entrées
NOTRE CRITIQUE
Le jeu de mot est facile mais il a le mérite de convenir parfaitement : Mars Attacks! est un OVNI dans la filmographie de Tim Burton. A bien des niveaux, le film semble échapper à ce qui avait fait la marque de fabrique du cinéma burtonien jusque là : un style visuel fort coloré, une cruauté impitoyable ou encore des personnages se présentant comme des archétypes déjantés ; on est en droit de se demander dans un premier temps où se trouve le cinéaste nuancé et délicat qui nous a tant enchantés dans ses précédentes œuvres.
Il est bien là pourtant et même plus présent que jamais. Avec Mars Attacks! Burton nous présente un des aspects de sa personnalité que l’on connaît peut-être moins mais qui n’a cessé d’être travaillé en filigrane dans son œuvre jusque là : un sens de l’observation imparable de ses compatriotes et plus largement de ses congénères dont il essaie à chaque film de comprendre le comportement. Cette lecture sociologique, elle était déjà présente dans ses personnages de reclus, rejetés par les « autres », autres en tant que voisinage bourgeois (Beetlejuice, Edward aux Mains d’Argent), qu’homme politique arriviste (Batman le Défi) ou qu’adultes apeurés (L’Etrange Noël de Monsieur Jack). Mais dans Mars Attacks! cette question devient centrale et définit la structure même du propos. Constitué de brèves saynètes mettant en scène un caractère précis du genre humain, le film se présente finalement comme l’humanité telle que Burton la voit et telle qu’il voudrait qu’elle soit.
Afin de s’amuser à sa guise, Burton part d’une idée simple qui lui est inspirée par des cartes en vente aux Etats-Unis : les Martiens arrivent sur la Terre et la mettent à feu et à sang. L’agressivité intrinsèque des extra-terrestres n’a d’égale que leur cynisme décapant. Aucune entente possible : les êtres humains devront y passer.
A partir de cette idée classique, mais traitée ici avec une perspicacité et un humour tout burtonien, le cinéaste se déchaîne et nous offre une galerie impressionnante de personnages : le président des Etats-Unis, la première dame, leur fille, un général belliqueux, un homme d’affaire peu scrupuleux, sa femme alcoolique, un scientifique à l’optimisme niais, un avocat allumé, un ancien boxeur noir converti à l’Islam, un ado un peu simple d’esprit et sa grand-mère sénile, etc. C’est toute la société américaine qui y passe (dans les deux sens de l’expression) ! Chacun de ces protagonistes réagira différemment à l’arrivée des Martiens et au carnage qui s’ensuivra : indifférence, dégoût, hargne, incompréhension, encore une fois, Burton chercher à brasser le plus possible de sentiments, transformant son film en une succession effrénée d’émotions, quitte à être légèrement brouillon de temps à autre. L’intérêt ne se trouve pas dans l’intrigue, qui est ici un prétexte, mais dans les situations qu’elle génère.
Mars Attacks! est donc aussi un règlement de comptes : au final, l’humanité se voit purgée de tous ceux qui essaient de l’abuser ou d’en profiter. Hommes politiques, militaires, journalistes, avocats ; il ne reste plus que les simples gens, ceux à qui on ne demande jamais leur avis. Il ne faut pas croire cependant que Burton se laisse aller à une écriture aussi simple (notons que s’il n’est pas crédité au générique, le cinéaste peut être considéré comme co-scénariste du film aux dires de l’auteur du scénario, Jonathan Gems). En effet, si ces personnages peu recommandables sont désintégrés par les Martiens, ils le sont avant tout par eux-mêmes, par leur comportement détestable et pernicieux. Il s’agit donc moins d’une revanche voire d’une vengeance que d’un dénouement inévitable pour les « malheureux » (ces opportunistes deviennent rapidement attachants, un sentiment dont joue beaucoup Burton pendant le film, et qui prend dans ce cas la tournure d’une énième manipulation par leur soin). Les morts imaginées sont toutes plus hilarantes les unes des autres et résument de façon très lucide, les vies qui s’achèvent net devant nos yeux : le président meurt dans un dernier accès d’égocentrisme et démagogie, l’avocat est pulvérisé alors qu’il tentait encore une fois de marchander et le jeune militaire écervelé découvre trop tard l’écart entre son entraînement (ou endoctrinement) et la réalité de la guerre. En une image, Burton fait mouche, comme à son habitude.
Le réalisateur est cependant conscient que même les personnages censés représenter les « héros » du film, en fait ceux qui survivent, ont également leurs limites : le pacifisme de la femme de l’entrepreneur avide de dollars frise le ridicule, l’adolescent discret et maladroit n’a pas grand-chose à dire et l’optimisme du scientifique est d’une incroyable naïveté. Seulement voilà, ces êtres humains ont foi en ce qu’ils font ; ils le font peut-être mal mais ils croient réellement en la valeur juste de leur acte ou de leur propos. Ils sont à côté de la plaque, oui ; cependant, leur ténacité et leur volonté leur permettent d’échapper au triste sort de leurs compatriotes (et si le professeur disparaît dans les flots, c’est en embrassant la femme dont il est amoureux, dernier acte purement irrationnel qui fait éclater tout son savoir et ses croyances scientifiques). On retrouve ici une approche qu’avait déjà effectuée Burton pour ses personnages de Ed Wood.
Finalement, le seul vrai héros du film c’est le boxeur noir, musulman et séparé de sa femme (plutôt inhabituel comme héros, loin des conventions hollywoodiennes). Pourquoi lui ? Pourquoi pas? Un homme qui veut simplement rentrer chez lui, pour retrouver son épouse et ses enfants, pour oublier son boulot, et qui est prêt à tout pour ça, quoi de plus simple ? C’est la lutte de chaque père de famille qui travaille pour permettre à sa famille de subsister. En faisant de cet archétype simple et dont on ne se rend même plus compte, le héros de son histoire, Burton cherche clairement à installer une autre hiérarchie des valeurs ; il quitte les chemins traditionnels (gloire, argent, célébrité – c’est plutôt la mamie sénile qui va sauver le monde grâce à ses disques country) pour emprunter ceux dont on ne parle jamais (ou en multipliant les lieux communs) et qui sont pourtant essentiels à nos sociétés. Ce sont ces gens, quel que soit leur milieu, qui à la fin du film reçoivent la responsabilité de la Terre. Que vont-ils en faire ? On n’en sait rien et finalement ça n’a pas d’importance. Simplement, pour une fois, c’est à eux qu’on a décerné une médaille.
Final utopique mais loin d’être candide et qui ouvre la porte à de nombreuses pistes de réflexion. Il ne se présente pas comme une solution aux problèmes de l’humanité mais plus comme une tentative, un essai d’autre chose qui pourrait peut-être marcher. On reconnaît là l’une des qualités principales de Tim Burton : une modestie et une honnêteté qui l’empêche de présenter sa façon de voir comme l’unique et seule acceptable, ce que beaucoup de cinéastes ont tendance à faire. A travers ce film, c’est donc aussi une leçon d’humilité que nous livre Burton.
Le casting du film est impressionnant et c’est un euphémisme. Qui plus est, chaque acteur est dirigé avec une précision exemplaire, le moindre geste, la moindre mimique, l’affirmant dans son rôle. Il faut voir Jack Nicholson en Président dans son discours qui suit le premier massacre, Pierce Brosnan assénant ses formules ampoulées entre deux bouffées de pipe ou encore Danny DeVito qui jubile pour un rien. Et les seconds rôles et apparitions éclairs sont innombrables : Pam Grier, Natalie Portman, Glenn Close, Michael J. Fox, Lisa Marie mais aussi Tom Jones qui trouve sans doute là le rôle de sa vie ! Le plus étonnant c’est que chaque acteur semble exactement à sa place, aucun ne se réservant la plus grosse part du gâteau, aucun ne dépréciant la qualité d’une scène. Et plus que tout, ils créent un ensemble cohérent et relevé, Ce qui était pourtant loin d’être une tâche aisée ; le film réussit sans doute là où les films catastrophes des années 70 (dont Mars Attacks! s’inspire ostensiblement) échouaient.
Au niveau visuel, Burton s’est encore une fois surpassé, mais aussi démarqué. A la trappe ses influences gothiques et expressionnistes, ses teintes sombres et inquiétantes et ses animations image par image. Ici tout est couleurs chaudes, voire criardes (Mars Attacks! est un summum du kitsch), recyclage d’images clés de la culture américaine (le fermier sur son tracteur, les shows télé, les limousines, la country, il y a presque autant d’exemples que de plans !) mais aussi images de synthèse puisque tous les petits Martiens et leurs soucoupes volantes sont entièrement réalisés en numérique (et d’ailleurs sacrément réussis).
Il n’en reste pas moins que visuellement, cela reste burtonien en diable, bourré à craquer d’idées et marqué par une véritable esthétique développée au fil du film.
Pour son grand retour dans l’univers de Burton (ils s’étaient disputés au début de la production de Ed Wood), Danny Elfman compose une partition au diapason du film : remplie d’influences diverses – le rock, les partitions de science-fiction de Bernard Herrmann, les morceaux lounge, etc. -, quelque part entre la marche militaire autoritaire et le burlesque. L’utilisation des fameux Theremin et Ondes Martenot, ces instruments aux sonorités particulières donnent à la musique un cachet volontairement rétro et nostalgique. L’association de la musique aux images est dès le départ époustouflante dans un générique d’ouverture qui restera dans les annales : les vaisseaux, de plus en plus nombreux, se dirigeant vers la Terre accompagnés par le thème principal du film repris à l’unisson par un orchestre déchaîné, c’est peut-être l’un des sommets de la collaboration Burton/Elfman.
Et puis difficile de ne pas évoquer « Indian Love Call », le tube country dont l’utilisation dans le film est loin de lui rendre hommage, puisque c’est la voix haut perchée insupportable de son chanteur qui vient à bout des Martiens. Néanmoins, il est sans doute impossible de la dissocier du film désormais tant la chanson semble avoir été écrite pour lui.
Échec commercial et critique aux USA, qui avait fait cette année-là de Independance Day le succès de l’été (tout un symbole), le film fait toujours aussi peu l’unanimité dans son pays, même s’il a ses fans. En Europe, l’accueil a été autrement plus chaleureux sans qu’il s’agisse toutefois du plus gros succès de Tim Burton. Dès lors pour beaucoup, Mars Attacks! constitue un faux pas ou une erreur de parcours ; or on est bien loin, je crois que vous l’avez compris maintenant. Au contraire, il s’agit d’une lecture très personnelle mais brillante des relations humaines et sociales, dans une société qui les a bien souvent perverties. Avec un humour fulgurant, Burton nous dit des choses très sérieuses et prend clairement position, quitte à laisser le champ libre aux critiques. Car quel que soit le film, le cinéaste ne se ment pas à lui-même et s’offre à voir entièrement; à cet égard, Mars Attacks! en est peut-être l’un des exemples les plus frappants.
LES ANECDOTES
Annette Bening, qui n’a pas pu jouer le rôle de Catwoman dans Batman Le Défié à cause du chute à cheval, a été recontactée par Tim Burton pour jouer dans Mars Attacks !, proposition qu’elle a bien sûr accepté.
L’autre série de cartes à collectionner Dinosaurs Attack ! avait été évoquée pour une adaptation cinématographique mais le projet ne s’est pas fait à cause de sa ressemblance avec le film Jurassic Park de Steven Spielberg.
Mars Attacks ! est sorti 5 mois après Independence Day aux Etats-Unis, ce qui lui a valu une incompréhension totale vis-à-vis du public Américain qui n’a pas forcément vu le 2nd degré du film. Pour Tim Burton, Mars Attacks ! n’est pas une critique des Etats-Unis mais plutôt son ressenti en tant qu’incompris lui-même.
LA BOUTIQUE
Tim Burton 1996 © Warner Bros