Edito avril 2012 : vers un dépoussiérage général ? Réflexions sur le site et sur Dark Shadows


Un dépoussiérage chez nous…

Le printemps arrive, et afin de ne pas perdre les traditions, nous avons nous aussi décidé de nous livrer à un petit dépoussiérage ! Peut-être l’avez-vous noté, mais de nouveaux éléments ont fait leur apparition sur le site. Celui-ci devra ainsi à terme répondre de manière efficace à sa triple mission : informer au jour le jour, être une base de données et d’informations sur Tim Burton et enfin être une communauté vivante et accessible au travers de son forum.

En premier lieu, la galerie a été largement complétée par Je Suis Sur Le Fil et intègre maintenant des instantanés des différents films de Burton ainsi que des photos de tournage ou des dessins préparatoire. Amusez-vous d’ors et déjà bien à la parcourir ! De la même manière, de nouvelles rubriques ont été créées. Il s’agit en effet désormais de considérer Burton non pas comme un simple réalisateur mais bien comme un artiste complet. L’exposition qui lui est dédiée, actuellement et jusqu’au 7 août 2012, à la Cinémathèque française en est sans aucun doute l’exemple le plus frappant. Ces sections sont amenées à être enrichies afin de vous donner à voir un véritable panorama du travail de Burton.

C’est en suivant cette même logique que nous allons nous atteler à un énorme travail de remise à niveau du site en emplissant de manière complète les fiches liées aux différents projets de Burton, ainsi qu’en mettant en place une nouvelle section consacrée aux dossiers analytiques. Jusqu’ici confinées dans les recoins les plus reculés du forum, ces analyse effectuées par des membres de la communauté Tim-Burton.net méritent d’avoir toute leur place au premier plan sur le site même.
La refonte du site sera également ergonomique de manière à rendre l’ensemble de ce nouveau contenu plus accessible, agréable et compréhensible. Rendez-vous d’ici septembre donc afin de découvrir toutes ces nouveautés qui devraient évoluer sans cesse !

Mais aussi un dépoussiérage chez Burton même ?

Mais le dépoussiérage ne semble pas être tenu comme règle par nous seul, à voir ce qui nous attend avec Dark Shadows. Car c’est bien là l’actualité brûlante du moment et le film semble ne devoir cesser de déclencher les passions. Pensez donc : d’une part nous avons les fans purs et durs du soap original, fort peu connu dans nos contrées francophones mais qui a le statut d’objet télévisuel culte aux Etats-Unis. Ceux-ci sont en droit d’attendre un adaptation fidèle, dans l’esprit tout au moins, à la série originale. De l’autre, nous avons les fans de Burton, en attente d’un vrai dépoussiérage de l’oeuvre de leur cinéaste favori. Il faut dire que la dernière décennie a connu des hauts et des bas dans la production cinématographique de l’auteur, se concluant notamment sur un catastrophique Alice aux Pays des Merveilles qui avait fait dire à plus d’un que Burton était définitivement fini. Double enjeu donc pour le réalisateur qui doit parvenir à contenter deux franges de spectateurs aux attentes parfois opposées. La diffusion de la bande-annonce du film par la Warner Bros. de manière étonnamment tardive ne fait que confirmer ce challenge : le moins que l’on puisse dire, c’est que celle-ci a su faire parler d’elle. Si les fans du cinéaste ont cru pouvoir y retrouver l’humour macabre teinté de gothique du Burton de la première heure, ceux de Dark Shadows ont en revanche été nombreux à hurler à la trahison d’une oeuvre macabre, certes, mais également résolument sérieuse, qui serait complètement tournée en ridicule par une vision moqueuse.

Leurs craintes sont légitimes et on ne peut que les comprendre lorsque l’on entend Helena Bonham Carter, qui interprète la psychiatre Julia Hoffman dans le film déclarer à MTV :

C’est vraiment un soap opera incroyablement mauvais, au point que cela en devient drôle. Et parce que justement c’est si mauvais, [Burton] a ressenti le besoin d’en faire un film immensément cher.

Ajoutez à cela que Seth Grahame-Smith, le scénariste du projet, est trop jeune pour avoir grandi avec la série et que son écriture, jusqu’ici, se caractérise essentiellement par une place centrale d’un humour relativement potache et l’on peut cerner la véritable hantise qu’ont les fans de Dark Shadows de voir leur oeuvre de jeunesse être transformée en comédie ridiculisant allègrement ses personnages.

Mais pour autant, faut-il cracher sur le film avant même sa sortie ? Divers éléments nous poussent à nuancer cette approche. Le premier est bien entendu que nous ne sommes ici que face à une bande-annonce. Celle-ci ne saurait refléter le film dans son ensemble et le fait qu’elle ait été dévoilée aussi tard trahit probablement une grande difficulté dans la composition de celle-ci. Est-ce du à une très grande diversité de tonalité au sein même du film ? La question mérite d’être posée, et ce d’autant plus lorsque l’on sait que Helena Bonham Carter, dans la même interview à MTV, déclare : « [Dark Shadows] est très original. C’est impossible de le ranger dans une case unique. En fait, ça va être impossible à vendre ». Un autre élément est le respect pour la série qu’ont les deux initiateurs du projets, Tim Burton et Johnny Depp, ce dernier étant également producteur au travers de sa boîte Infinitum Nihil. Ils sont tous deux de très grands fans du soap original qu’ils ne rataient pour rien au monde dans leur jeunesse. De telles personnes seraient-elles enclines à trahir un amour d’enfance ?

Enfin, il s’agit de revenir à la notion même de dépoussiérage qui nous est aujourd’hui si chère. Peut-on décemment adapter une oeuvre sans en changer le moindre élément, a fortiori lorsque cette oeuvre est vieille de plus de trente ans et a, dans sa forme tout au moins, pris un certain coup de vieux ? L’adaptation suppose une part de réappropriation, et ceci est d’autant plus vrai lorsque le projet est confié à quelqu’un se nommant Tim Burton, connu pour apposer sa patte sur tout ce qu’il touche. En bâtissant une version personnelle de Dark Shadows et en remettant la série au goût du jour dans le cadre de ce qui est l’un des films hollywoodiens les plus attendus du printemps, n’y a-t-il pas moyen de faire découvrir un Dark Shadows à une nouvelle génération ? Et surtout, l’oeuvre n’en devient-elle pas ainsi vivante car multiforme et modulable. Au fond, si la qualité est au rendez-vous, ce que nous espérons tous, peu importe le ton adopté. Cette version de Dark Shadows ne saurait être définitive et occulter de manière totale ce qu’est le soap original. Comme toute adaptation intelligente, au contraire, elle aura fait de la franchise un objet vivace, en mouvement, et dirigé vers l’avenir. Et si en plus elle s’inscrivait dans une logique cinématographique de Burton en y apportant une brique supplémentaire et solide, que demander de mieux ?

Ne serait-ce pas là un bien beau dépoussiérage ?