J’ai eu la chance d’assister à une projection de presse ce jeudi et je me sens fin prêt pour vous faire part de mes impressions :Tout d’abord, il faut saluer l’effort technique. Le film est d’une maestria visuelle incroyable, un festival pour les yeux, une beautéplastique que l’on admire d’autant plus lorsqu’on connaît le travail de fourmis qui a été demandé pour arriver à ce résultat. L’équipe du film n’a pas eu froid aux yeux, s’essayant à des plans toujours plus complexes alors que la technique de l’image par image complique déjà beaucoup ce qui est simple la plupart du temps. Le parti pris de désaturer complètement le Monde des Vivants pour qu’il ne propose plus qu’un morne gris et de l’opposer au Monde des Morts, coloré et extravagant, est d’une efficacité redoutable. Bref, allez-y les yeux grands ouverts pour ne pas en rater une miette.
Le film en lui-même, derrière ses accents naïfs (et ses quelques petits problèmes de scénario avouons-le), n’a qu’un seul sujet : l’amour. Comment, un mauvais film Disney ? Non bien entendu. C’est simplement la première fois que Tim Burton fait du moteur principal de son film le sentiment amoureux, sous toutes ses formes. Toujours en filigrane dans ses oeuvres passées, malgré son importance certaine, l’amour devient ici le centre de toutes les attentions : peut-on aimer au premier regard ? Peut-on vivre uniquement d’amour, est-ce suffisant ? Ce genre de questions sont abordées de front, sans niaiserie et parfois avec une ambiguïté bienvenue (L’amour ne peut-il être multiple ? La mort en est-il un frein?).
Encore une fois, Tim Burton’s Corpse Bride est un film que Burton n’aurait pas réalisé il y a 10 ans. En mettant en perspective une solitude devenue symbole de la perte de l’individu dans un néant destructeur et en la confrontant à un monde moins décalé même si toujours aussi équivoque, Burton pose la question de “qu’est-ce que mon cinéma lorsqu’il s’associe avec ce qu’il rejetait il y a peu ?”. Inconsciemment ou pas, il réinvente les codes de la seconde moitié de sa carrière. Dès lors, ce film sera autant rejeté par les puristes que les précédents. Tant pis, ce genre de films fait souvent partie des périodes les moins populaires des cinéastes..
Pour en revenir au film lui-même, il faut aussi souligner le travail immense des acteurs. Si The Nightmare before Christmas reste un cran au-dessus du film, sur ce point, Corpse Bride l’emporte. Chaque acteur apporte une personnalité si radicalement impertinente et riche que l’on s’étonne qu’ils ne doublent pas tous les films d’animations à venir ! Depp et sa candeur, Watson et son infinie douceur, Bonham Carter et son léger érotisme, Lumley dont la voix a du inspirer le design du personnage tant ils vont de pair et Finney qui fait trembler la salle de cinéma à chacune de ses interventions. Et puis, Christopher Lee dont il est inutile de dire qu’il est parfait.
Musicalement, le film baigne dans une ambiance très mélancolique proposée par un Danny Elfman en grande forme. Il offre une partition qui joue exclusivement sur les nuances (on est plus proche de Sleepy Hollow que de The Nightmare before Christmas). Le film ne se constitue presque que d’un seul thème dont il arrive à tirer presque tout ce qu’il veut. Ses chansons sont toujours aussi enjouées et inspirées, dans son style si particulier, bien loin de la guimauve du Disney de ces dernières années. Il faut voir la préparation du mariage par la ville des Morts pour y croire, un festival de notes sur des images qui lui rendent un bien bel hommage. A noter aussi, des compositions pour piano très touchantes.
Il y aurait tant de choses à dire !
Certes, le film n’est peut-être un chef-d’œuvre mais est sans conteste un grand réussite, la preuve encore que Tim Burton (ainsi que son équipe, on ne rappellera jamais assez que ce genre de films appartient à tous ceux qui y ont contribué plus qu’à un seul homme) n’a pas fini de faire parler de lui !
Courez voir le film dès mercredi !
PS : Saurez-vous trouver le petit clin d’oeil à Harryhausen ? Il n’est pas difficile à déceler…