Le retour de la chauve-souris est annoncé. Mais face à Catwoman, Batman n’est plus qu’un oiseau pour le chat.
L’ombre de la mort plane sur Gotham City. Décidément peu doués, les politiciens du cru se sont à nouveau fait rouler par un certain Max Shreck, milliardaire de son état, qui veut faire alliance avec le « Pingouin » pour mener à mal ses desseins les plus noirs.
Le « Pingouin » ? Toute la misère et la haine du monde à lui seul ! Balancé à la rivière par des parents marris d’avoir engendré une telle progéniture (déjà au berceau, « bébé » préférait le chat au biberon), la pauv’bête a été recueillie par un zoo. Sa monstrueuse adolescence passée en compagnie de palmidèdes plus idiots qu’un pot de yaourt s’y est longtemps nourrie d’un ardent désir de vengeance. Mais cette fois, le moment est venu de vider sa rancoeur : le « Pingouin » deviendra maire de Gotham. Il n’aura plus ensuite qu’à rayer la ville de la carte.
C’est évidemment sans compter avec Batman qui trouve sur sa route, outre ces deux personnages peu fréquentables, la superbe Catwoman. Bien sûr, notre déguisé aimerait l’emmener faire un tour dans sa Batmobile. Mais la belle a des principes : arrachée à la mort par ses amis les chats, la timide secrétaire de Shreck ne s’est tout de même pas transformée en une dangereuse féline pour s’abandonner entre les ailes de la première chauve-souris venue. Et pourtant, ce n’est ni l’amour ni le goût du poisson qui la poussent au moment de s’allier au « Pingouin »…
« Batman Returns », devenu « Batman, le défi » dans sa version française, a de fait constitué un important challenge pour Tim Burton (« Edward aux mains d’argent », « Batman ») qui a confirmé avec ce film ses talents de réalisateur prolixe et original. Le cinéma US réclamait des oeuvres hautes en couleur, inventives et audacieuses ? En voici une.
Haut perché dans les sommets de la mascarade et de la cruauté infantile, « Batman, le défi » fait en effet mieux que rendre vie au mythe : il lui donne la démesure que seule une imagination de gamin pouvait lui offrir. La seconde facétie de Tim Burton est un gouffre sans fin où l’obscurité le dispute aux rayons d’un astre malade. Derrière le noir infiniment noir, derrière chaque halo pâlissant, c’est l’univers fantasmatique des gosses qui ont trop lu qui prend vie. Monumental, baroque ou gothique mais toujours gigantesque, cet autre « Batman » tient le spectateur constamment en haleine, en alerte plutôt, entre l’inquiétude d’une violence volontiers outrancière et l’amusement provoqué par cette grosse farce freudienne.
« Batman, le défi » est un film qu’il faut bien sûr regarder au second degré, comme une fantastique bouffonnerie. La seule idée d’avoir fait d’un charmant pingouin l’ennemi n° 1 de toute une nation n’est-elle pas déjà tout à fait affolante ?
Influencé par « Elephant Man » ou « Brazil », Tim Burton fait donc mieux que défendre ce retour programmé face à son premier « Batman », même si le « Défi » souffre d’un évident manque de cohésion. Danny De Vito-le-Pingouin n’est pas Jack Nicholson-le-Joker, mais tout de même : quelle fabuleuse caricature de monstre ambigu et débile il nous livre là, sous l’épaisseur de son maquillage et le cocasse d’un pyjama spécial banquise. Michael Keaton joue accessoirement les zorros de service. On le voit peu. Le verrait-on davantage qu’il serait complètement laminé par la prestation de Michelle Pfeiffer dont le répertoire ne semble pas connaître de limites.
Habillée de cuir façon sado-maso, la féline s’est bien arrogée la nuit de Gotham City. En cela, Batman a perdu son défi…